Un aspect du Monde : la géographie flamboyante de Fernando Vicente

Publié par Pierre MACIA le

L’atlas, ce mot évoque deux manières très différentes de
percevoir le monde. La première qui vient à l’esprit est un livre contenant
une collection de cartes couvrant la planète de manière exhaustive et descriptive. Et
puis il y a le titan Atlas grec, condamné à porter le poids du monde entier sur ses épaules.
L’artiste espagnol Fernando  Vicente revisite
cette fusion de la signalétique et du symbolique, mais étend le concept à sa
conclusion littérale en superposant des formes humaines et animales sur les
pays et les continents de la carte. Fernando Vicente transforme les contours
géographiques en inventant de surprenantes et nouvelles constructions. Les cartes deviennent des
créatures vivantes d’une qualité déconcertante.

Ces cartes ressemblent souvent à des extraits de vieux catalogues
et s’attachent à d’obscures références symboliques, aujourd’hui à moitié oubliées ou difficiles à
comprendre. Les exemples modernes sont généralement plus faciles à saisir et
peuvent être le résultat de la suggestibilité flagrante de la géographie elle-même. 

Le  travail de  Vicente  donne à un objet essentiellement utilitaire, la carte, sa vision poétique. Mais rien ne
transforme le hasard en art agréable comme une carte. Vicente transforme cette appréciation passive en une
activité où il faut sonder les cartes pour trouver des indices de formes
non-géographiques. Par exemple : ce coude est-il un isthme ? 
Ce front une chaîne de montagnes?

Ce processus doit impliquer de retourner fréquemment les
cartes. Les formes familières d’un pays sont aussi de fortes
images mentales que l’artiste a besoin d’exprimer. Prenez,
par exemple, sa carte en forme de dauphin du Mexique. Votre représentation
moyenne du Mexique, sur une carte avec le nord en place, ne suggère rien tant
que le Mexique lui-même. Mais si vous lui donnez un quart de tour à gauche avec l’est vers le
haut et si vous êtes à la recherche de formes de vie…la péninsule du Yucatan
ressemble effectivement à  une sorte de queue. Et puis d’autres parties
du Mexique commencent à ressembler à d’autres parties de l’animal dont il a pris  effectivement
la forme: le museau pointant vers San Diego, la nageoire dorsale formant le Golfe  de la frontière du Texas  au Mexique.

Un processus similaire permet de créer la carte
« d’Eléphantine l’Argentine » (ou l’éléphant d’Argentine). Son tronc se révèle après avoir donné un quart de tour vers la droite à la carte. La
province de Buenos Aires, bombé vers l’est dans l’Atlantique Sud, devient la joue
ronde de l’éléphant. Dans une belle touche, la trompe de
l’éléphant pointe vers les îles Falkland,
une possession britannique revendiquée par les Argentins en tant  qu’îles
Malouines.

Dans une autre vision de l’Amérique latine, le continent
tout entier est bouleversé pour révéler une femme enceinte et contre-disséqué. Les
Andes sont la colonne vertébrale, les renflements des deux
côtes sont transformés en courbes de son ventre et  l’utérus
coïncide avec le Brésil, comme si l’Amérique latine est enceinte de sa
propre superpuissance naissante.

Une  carte de l’Afrique se transforme en un portrait
de femme noire à l’aide de la Corne de l’Afrique comme base de son front et
la rondeur de l’Afrique occidentale comme l’extérieur de sa tête. Tourner maintenant cette carte à l’envers et apparait un portrait d’inspiration d' »Holbein » . La côte occidentale de
l’Afrique sert de frontière entre le couvercle et le visage.
Autre carte fascinante de  Fernando Vicente : la
Grande-Bretagne et l’Irlande représentées comme un couple de lapins morts.

A ces puissantes images, Fernando Vicente a proposé une suite impressionnante avec une exposition virtuelle sur Google-Earth. Géographie, cart’ographie, univers numérique à découvrir donc  ici :

Fernando
Vicente – Atlas.kmz

Fernando Vicente le site : http://www.fernandovicente.es/