INSOUMISSION

Publié par Pierre MACIA le

La question de la liberté d’expression est décisive. C’est un joyau de fer. Un diamant brut.
Il n’y a pas de bonnes religions. Il n’y a pas de bonnes et saintes « Ecritures ».
 Il n’y a pas de paradis ni d’enfer.
Comme il n’y a pas de guerres justes, ni de bons chrétiens ni de méchants musulmans, des mécréants, des infidèles.
Il n’y a pas de bons imams, ni de pape humaniste.
Toutes les religions ont été du côté du pouvoir. De tous temps, toujours.
Elles ont toujours été du coté des fascistes, des dictatures, des tyrans.
Elles
ont couronné des barbares, lancé ses fatwas, brulé des livres, détruit
des érudits, des savants, béni les guerres, baptisé des canons,  validé
les idées les plus rétrogrades, les plus réactionnaires, humilié
l’homme, voilé la femme, coupé les mains, muré des intellectuels.
Elles
ont été inventées pour opprimer le peuple, pour l’enfermer, pour mettre
une camisole morale sur toute idée de liberté, d’émancipation, de prise
à charge de sa vie pour la quête de son propre bonheur, pas un bonheur
au rabais, pas à l’ombre glacial d’un dieu intégriste, pas pour un
paradis hypothétique, une terre promise comme une carotte pour une vie
de bâton.
Toutes les religions renferment en elle la face exécrable du monde, l’intolérance et le fanatisme.
Aucune ne veut la grandeur de l’homme ni sa libération.
Toutes
les religions imposent la soumission, et le livre de Houellebecq qui
apporte sa petite pierre transgressive résonne ce soir d’une manière
bizarre.
Toutes les religions sont dangereuses. Elles furent longtemps un opium.
Et on a tué en son nom.
On
a tué Charb, Wolinsky, Tignous, Cabu, Honoré, Elsa Cayat, Bernard Maris et des
pauvres flics au nom d’Allah, du dieu d’Abraham, de Jonas et de Job
sur son tas de fumier, de Mahomet dans sa tente bédouine.
Dans toutes
les dictatures du monde, on commence toujours par tuer les poètes, les hommes de
plumes, les intellectuels qui représentent  les choix de notre
civilisation.
De la civilisation que l’on a choisie.
Vingt-quatre
ans après la publication des « Versets sataniques » en 1988, Salman
Rushdie est toujours la cible d’extrémistes musulmans. Sa tête est
toujours mise à prix à 3,3 millions de dollars.
Des dessinateurs
vivent sous protection à travers le monde. Des caricaturistes sont
attaqués à la hache, vivent dans des bunkers, roulent dans des voitures
blindées.
Ce sont toujours les hommes éduqués qui sont visés.
Les tueurs ne savent même pas qui étaient Cabu ou Wolinsky et non jamais lu Charlie Hebdo.
Il n’y a pas de face à face de civilisations, d’axe du mal, de stigmatisation, d’amalgame.
Le peuple arabe n’est pas en cause, ni sa jeunesse, ni l’émigration, ni l’étranger.
C’est
une question de société, de laïcité, de république, de loi, de régime
commun avec lequel on vit, de socle universel, de liberté, d’égalité, de
fraternité.
Et ce n’est pas une question d’intégration. On ne peut pas intégrer les fachos. On n’en veut pas !
L’extrême
droite ne peut même pas  récupérer cet événement  puisque Cabu, Charb,
Wolinsky méprisaient toutes formes de populisme, vomissaient sur Le Pen
et ses affidés, marchaient sur les intégristes, écrabouillaient les
cathos extrémistes.
Ces vieilles sentinelles libertaires ne mourront pas. Les graines qu’ils ont semées fleurissent toujours.
Charlie a construit notre sens critique. Notre méfiance envers les idées toutes faites, le populisme facile, les faux prophètes.
Cabu, Charb, Wolinsky, Tignous, Honoré, Cayat, Maris n’iront pas au paradis.
Ils sont morts de rire.
Et c’est impardonnable.
Il faut maintenant se poser les bonnes questions pour qu’ils ne soient pas morts pour rien.

« La poésie, c’est avant tout une fatalité, l’aboutissement d’une longue résistance spirituelle et en même temps une façon de résister, c’est le feu qui jaillit hors du choc avec les couches les plus solides, les plus profondes… » Varlam Chalamov

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